Presse International

Tournée en France d’Eva-Maria-Hagen, mars 2001
(Rouen, Aix-en-Provence, Dijon, Lille, Paris)



Biographie d’Eva-Maria Hagen (par Corinne Bouillot, décembre 2000)

Née en 1934, Eva-Maria Hagen passe les premières années de sa vie en Poméranie, dans les territoires orientaux de l’Allemagne aujourd’hui polonais, avant d’en être expulsée en 1945 et de s’installer dans la zone d’occupation soviétique, qui deviendra la RDA en 1949. Après un apprentissage de serrurier-mécanicien, elle entre au conservatoire de théâtre de Berlin-Est et fait ses premières armes de comédienne au Berliner Ensemble sous la direction de Bertolt Brecht en 1953.
Après avoir épousé l’écrivain-scénariste Hans Olivia-Hagen et donné naissance à Nina, qui deviendra plus tard la rockeuse de renommée internationale que l’on sait, elle commence en 1957 sa carrière d’actrice de théâtre et de cinéma et se voit rapidement proposer des rôles principaux, comme dans le film Vergeßt mir meine Traudel nicht. Elle se produit au théâtre Maxime Gorki de Berlin-Est et dans de nombreuses villes de RDA, entre autre dans My fair lady, Can-can et Professor Unrath (L’Ange bleu), et tourne jusqu’en 1965 une cinquantaine de films pour le cinéma et la télévision.
Elle rencontre en 1965 le célèbre auteur-compositeur-interprète Wolf Biermann, dont les textes engagés et polémiques deviennent très vite emblématiques de l’opposition au socialisme d’État et de la volonté d’une partie des intellectuels et artistes est-allemands de construire un « socialisme à visage humain ». Alors que Wolf Biermann est interdit peu après, Eva-Maria Hagen subit elle aussi diffamations, chantage, menaces de la Stasi (Sécurité d’État) et entraves à sa pratique professionnelle. C’est à cette époque qu’elle commence en effet à interpréter sur scène les chansons de celui que les milieux dirigeants considèrent – bien qu’il ne renonce pas à son attachement au socialisme – comme un « ennemi de l’État des ouvriers et des paysans ».
L’engagement d’Eva-Maria Hagen dans le mouvement de protestation et de soutien à Wolf Biermann, expatrié en 1976 après un concert à l’Ouest, lui vaut de subir à son tour un interdit professionnel, puis d’être elle aussi déchue de sa citoyenneté est-allemande en 1977. La comédienne et chanteuse, qui jouissait jusque là d’une grande popularité en RDA, s’installe alors à Hambourg, non loin de Wolf Biermann avec qui elle continue à entretenir d’étroites relations personnelles et professionnelles. Elle poursuit à l’Ouest sa carrière d’actrice de théâtre (La dame aux camélias, Woyzeck...) et de cinéma. Au cours des années suivantes, elle enregistre des chansons de Wolf Biermann, ainsi que des ballades russes, tziganes et baltes traduites par ce dernier. Elle donne, à partir de 1977, de nombreux récitals en Allemagne, en Suisse, en Autriche, aux Pays-Bas, en Suède, en Italie et en France.
Depuis 1985, elle est accompagnée au piano par Siegfried Gerlich, qui est également l’arrangeur de ses nouveaux enregistrements. Après 13 années d’interdiction de séjour en RDA, elle tourne de nouveau pour les studios de cinéma est-allemands en 1989. Après avoir joué Mère Courage en 1995 au théâtre à Hambourg, elle enregistre en 1997 un CD en hommage à Bertolt Brecht, à l’occasion du centième anniversaire de la naissance de celui-ci, et se produit en Allemagne et à l’étranger (Grande-Bretagne, Suède, Ukraine...) avec un récital de songs de Brecht.
Elle publie en 1998 l’ouvrage autobiographique Eva und der Wolf, dans lequel elle retrace, à partir de lettres et de documents d’archives, sa relation avec Biermann et les difficultés politiques auxquelles ils furent tous deux confrontés. Cet ouvrage, pour lequel elle s’est vu décerner en 1999 la médaille Carl Zuckmayer de la langue allemande, se présente comme « un tableau coloré, à la Bruegel, des moeurs de l’époque de la RDA et un exemple de la joie et de l’art de vivre d’une femme en des temps sombres – non, je veux dire en des temps joliment mouvementés » (Wolf Biermann). Après la parution d’Eva und der Wolf, elle donne des concerts-lectures dans une cinquantaine de villes allemandes et étrangères (Vienne, Copenhague, Göteborg, Vérone...) et se produit dans de nombreuses émissions de télévision, notamment aux côtés de Nina Hagen et de sa petite fille Cosma Shiva, elle aussi comédienne. Elle se consacre également à la peinture et expose ses toiles en Allemagne.


Un article plus détaillé sur la biographie d’Eva-Maria Hagen a été publié à l’occasion de sa tournée en France par C. Bouillot, Maître de Conférences à l’Université de Rouen.
Références : Corinne Bouillot : « Eva-Maria Hagen – Comédienne, chanteuse et socialiste entre Est et Ouest », in Allemagne d’aujourd’hui, N° 154, oct.-déc. 2000, p. 97-110
Disponible à l’adresse suivante : http://allemagne-aujourdhui.septentrion.com/


EVA-MARIA HAGEN CHANTE BRECHT ET BIERMANN

Jeudi 8 mars 2001, 20h30, Théâtre Duchamp-Villon, Rouen
(en collaboration avec l’Université de Rouen)
A l’occasion de la journée internationale des femmes, dans le cadre du colloque
Femmes, féminismes, socialismes dans l’espace germanophone 1945-2000


Dans le cadre de ce colloque, qui a pour objectif de fournir une approche critique des relations multiformes et souvent conflictuelles que les femmes de l’espace germanophone ont entretenues depuis 1945 avec le(s) socialisme(s) – en tant que théorie, mouvement organisé et pouvoir –, le choix d’un récital d’Eva-Maria Hagen n’est pas le fruit du hasard. Qui pouvait, dans un programme culturel associé aux travaux scientifiques, mieux incarner la thématique de ce projet que cette chanteuse et comédienne qui a compté parmi les artistes les plus populaires de RDA, avant de poursuivre sa carrière en Allemagne de l’Ouest ? Sa vie de femme et ses engagements auprès du poète-chanteur Wolf Biermann, expulsé de RDA en 1976, ont été constamment marqués par l’ambiguïté de ses rapports avec le socialisme, entre attachement au potentiel émancipateur de celui-ci et rejet de sa perversion par le système est-allemand.
Accompagnée par son pianiste Siegfried Gerlich, Eva-Maria Hagen interprète notamment les célèbres songs de Bertolt Brecht et Kurt Weill, ainsi que les chansons de révolte de Biermann, dont le nom reste associé à l’une des périodes les plus tourmentées de l’histoire de la RDA – devenue plus que jamais histoire de l’Allemagne dans son ensemble depuis la chute du Mur de Berlin et l’Unification.
Eva-Maria Hagen séduit par sa douceur, dérange par son brin d’insolence, surprend par la variété de son jeu théâtral et de ses accents vocaux. L’authenticité et l’émotion qui émanent de ses récitals en font une interprète appréciée d’un public de tous âges, conquis par la formidable envie de vivre et de se battre de « Celle de l’Est » (titre d’une chanson écrite pour elle par Wolf Biermann). Cette énergie sans cesse renouvelée, elle la tire de ses engagements passés et présents, d’un humanisme et d’un sens de la révolte que n’ont altérés ni les représailles politiques du temps de la RDA, ni la rupture imposée avec ce pays qu’elle aimait malgré tout, ni la rencontre au départ difficile avec ce qui était pour elle l’« autre » Allemagne. Aujourd’hui reconnue comme l’une des meilleures interprètes de Brecht en langue allemande, Eva-Maria Hagen impose sur la scène la présence d’une comédienne confirmée, d’une chanteuse à la voix tour à tour cristalline et profonde, d’une femme courageuse et militante.

Eva-Maria Hagen se produira également le lundi 5 mars à Aix-en-Provence (Maison de Tübingen), le mardi 6 mars à Dijon (Maison de Rhénanie-Palatinat), le mercredi 7 mars à Lille (Institut Goethe / Université Lille 3) et le samedi 10 mars à Paris (Maison Heinrich Heine)

Rouen Magazine N° 123, 28 février-6 mars 2001

Paris-Normandie, 6.3.2001
 


 


 

 

 

 

 

 

 


 

 


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